Je ne sais pas trop ce que j’ai attendu avant de découvrir le dernier Cameron qui me manquait (si l’on exclut Piranha 2 et ses docus ). Parce que c’est une sacrée claque et très probablement mon film préféré du réal. (Je précise que j’ai vu la version longue)
On le sait, Cameron est fasciné par les fonds marins et livre ici l’un des films ultimes sur le sujet. J’ai du mal à imaginer qu’on filme si bien les abysses, qu’on arrive à rentre ce côté à la fois oppressant et immense. On a un cadre parfait pour un film assez anxiogène et c’est exactement ce qu’on nous offre. Le film n’est ainsi pas dénué de scènes de pure tension, qu’il s’agisse de l’exploration de l’épave au début ou de ce putain de naufrage absolument suffoquant et qui préfigure clairement Titanic. Inutile de préciser que la réal est monstrueuse, d’une précision infinie. Il faut voir la manière dont Cameron manie la caméra portée, rendant une sensation de pur chaos tout en restant parfaitement limpide dans la lecture de l’action - il y a quelques moments de bravoure spectaculaires. Mais il est tout aussi impressionnant quand il pose sa caméra, filme son cadre et ses personnages avec minutie en jouant de cette lumière bleutée qui enveloppe tout.
Parce que c’est l’une des vraies forces : l’écriture. Une fois n’est pas coutume, Cameron arrive ici à jouer sur une fine frontière entre personnages typés et purs stéréotypes et crée de vrais individus, au rôle attendu mais avec une vraie personnalité. On a vraiment l’impression de voir une petite équipe qui existe en dehors du cadre de la caméra, il y a plein de rôles secondaires dont on ne sait pas grand chose mais qui laissent une certaine impression. Ça évite tous les écueils d’Aliens à mon sens. Même le méchant Marine a pas mal de nuances, on sent que c’est un perso qui évolue, qui est petit à petit mis à bout, le film lui donne pas mal de subtilités sans passer par le dialogue, simplement en jouant avec ses expressions faciales. Et j’ai énormément accroché à la dynamique entre Ed Harris et Mary Elizabeth Mastrantonio, voilà un “ex-couple” qui a une alchimie palpable à l’écran, qui génère une vraie émotion et permet une parfait équilibre entre l’intimité et le versant plus spectaculaire de l’ensemble - d’ailleurs leur relation est essentielle dans le développement thématique central.
Mais je crois que ce qui me touche le plus, c’est la manière dont le film met en scène le surnaturel et la rencontre avec l’inconnu. Parce qu’au-delà du côté oppressant, Cameron a parfaitement compris la dimension fascinante des fonds marins, quelque part tout aussi mystérieux que l’espace tout en étant beaucoup plus proches. Il y a une claire inspiration de Rencontres du Troisième Type et les deux films ont cette capacité à créer de purs mouvements de suspension, quand l’humain fait la rencontre avec quelque chose qui le dépasse complètement. Pas étonnant que chacun de ces films soient respectivement mes préférés de ces deux grands cinéastes du spectaculaire, qui ont parfaitement compris cette dimension transcendante de la rencontre avec l’alterité. Cameron dote d’ailleurs le tout d’une dimension véritablement religieuse, et cela joue bien entendu un rôle dans cette conclusion qui divise visiblement un peu. Je peux comprendre qu’on soit rebuté par la manière dont le film change un peu son procédé pour virer dans un côté prêcheur un peu simpliste, mais j’ai personnellement été touché par ce côté grande fable sur l’humanité - enfin c’est surtout la manière dont Cameron nous y amène et met en scène tout ce bordel qui me fascine.
Excellente musique de Silvestri également, c’est pas un taulier pour rien.
