On pourra éventuellement reprocher au flm son côté grand foutoir incompréhensible, ce qu'il est incontestablement. Mais je ne pense pas qu'intégrer une trame scénaristique plus claire aurait vraiment rendu le film plus agréable. L'univers créé par German est probablement le plus réaliste et terrifiant jamais vu. Le travail sur le décor, les personnages, la lumière, la caméra, l'ambiance est absolument bluffant. A tel point que l'on peut difficilement imaginer qu'il a été créé de toutes pièces. L'incompréhensibilité du scénario et des situations est totalement en accord avec le chaos qui règne dans ce monde. Bluffant.
Mouais. Pour moi ça tient plus de la mégalomanie qu'autre chose...
Mais je suis d'accord sur l'ambiance, il a tout à fait réussi à représenter ce qu'ont pu être les répugnantes heures de cette sombre période de l'histoire qu'a été le Moyen-âge...
Mais personnellement, je n'ai cessé de décrocher en permanence, jamais son univers n'a su me happer dans quelque chose d'imaginaire, de fantastique (c'est basé sur un roman de science-fiction).
J'ai vraiment ressenti un écart avec ce dont Sokurov est capable de créer comme atmosphère, avec tous ces chuchotements, ces personnages secondaires, à qui il arrive des choses banales, mais qui me fascine... dans le cas de German, à aucun moment je ne m'en préoccupais, encore pire, tout cela m'exapérais, toute cette agitation pour rien finalement.
Et c'est sûrement ça qui m'a le plus gêné : jamais German ne nous offre de respiration, à aucun moment il nous laisse le temps de respirer et de nous extirper de toute cette crasse, de toute cette boue...il nous laisse toujours le nez dans la merde, la bouche dans les glaires... après coup du film, ne me reste qu'un profond dégoût, une sensation étrange de malaise (mais dans les films de Sokurov, ce malaise est profondement réflexif, ne sachant exactement ce que l'on vient de voir, on s'interroge, on se questionne et de là, naît une pensée), qui ne me donne qu'une seule et unique envie, oublier le film le plus vite possible...
Après, je ne sais pas, c'était peut-être ce à quoi il aspirait, inspirer le degoût sur cet univers macabre (si c'est le cas c'est réussit effectivement bravo!), mais j'en doute, et dans ce cas là, ce n'est pas ma conception du cinéma...
Je sais pas si je vais noter le film parce que j'ai vraiment rien compris, à cause de la trame scénaristique et aussi des sous-titres anglais. D'habitude ça me pause pas de problème grâce à mon petit niveau d'anglais mais là il y avait des dizaines de mots que je saisissais pas, ça a pas aidé.
C'est vrai que je n'aurai pas refusé des moments de "respiration", mais pas pour les mêmes raisons: à force d'être constamment dans le vice, la crasse, la boue, le sang et les tripes je m'en suis accommodé au fil du film. Ce qui était presque de l'ordre de l'insoutenable au début de la séance est devenu "normal" et supportable par la suite. Quelques moments de répits plus marqués auraient donc été bien sentis à mes yeux, pour repartir de plus belle dans ce monde nauséabond.
Svetlana Karmalita (la femme de Guerman, qui a finalisé les derniers détails du films avec Guerman Jr. en respectant le plus possible les volontés du père) était là pour la présentation et un mini-débat de 30 minutes après le film. D'emblée elle a signalé que le film avait beaucoup de chance d'en déranger certains et qu'elle comprenait les personnes qui souhaiteraient quitter la salle au cours de la séance (et effectivement y'en a eu une bonne dizaine...). Elle a précisé qu'il y avait des reproductions d'oeuvres de Jérôme Bosch un peu partout sur les lieux du tournage, je ne connaissais que Le jardin des délices mais là je viens de tomber sur cette oeuvre qui représente assez bien l'univers du film: un incroyable foutoir que même Hobbes n'a certainement pas imaginé dans ses pires cauchemars.
Pour le reste, vous pouvez le lire ici, ça correspond à peu près à ce qu'elle a dit durant son intervention et lors du débat.
En ce qui concerne la relative incompréhension du scénario (on comprend tout de même certains enjeux, c'est pas le flou total), ça ne m'a pas tant gêné que ça parce que cela va de pair avec l'atmosphère putride du film, on nage en plein chaos, dans cette brume constante qui pue l'obscurantisme et la désolation.
En tout cas je pense qu'on est pas près de revoir un projet aussi dingue.