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Cruel Optimism
Paul Clipson
-
2017
Dieu seul le sait
John Huston
États-Unis
Royaume-Uni
1957
1h48
Heaven Knows, Mr. Allison
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Melaine
20/02/2019 23:29:30
Une sorte de remake d'
African Queen
, réalisé six ans plus tôt (un homme et une femme qui se rencontrent et se retrouvent seuls au beau milieu d’une nature hostile), mais dans lequel la vulgarité crasse du premier laisse place à une forme de pudeur tranquille. C'est tout simplement l'histoire, très classique, de deux personnages qui se rencontrent et se rendent compte qu'ils peuvent faire connaissance en dépassant les préjugés qui les séparent (bien aidés par les circonstances : ils doivent survivre à deux en territoire ennemi). C’est donc l’inverse d’
African Queen
, qui consistait à vérifier les stéréotypes de genre en situation de crise : on mettait face à face l’homme et la femme et on se moquait, d’un rire gras et viril, des minauderies de la femme (avant, bien sûr, de la prendre dans ses bras pour la protéger des sauvages qui attaquent sans raison). L’horrible laideur des deux acteurs d’
African Queen
, Bogart et Hepburn (que j’aime pourtant beaucoup par ailleurs, mais qui s’était trouvée grimée en bourgeoise crasseuse et grimaçante, et filmée ainsi avec un plaisir pervers), est remplacée par la tendre placidité de Deborah Kerr et Robert Mitchum. Les stéréotypes qui servent de base (une nonne prude et un soldat héroïque) sont mis en évidence par la mise-en-scène et ses étonnants champ/contre-champ à l’opposition très marquée (les lumières, la couleur, la composition…) mais sans cesse déjoués par les personnages, qui ne s’en préoccupent guère. Si bien qu’une certaine force naît de l’écart entre la contradiction visible des conventions et la sobriété sereine des acteurs. Cet écart, Huston ne manque pas de le filmer avec application : on le sent très impliqué auprès de ses personnages. Et tout le film, bien loin de l’hystérie poisseuse d’
African Queen
, baigne dans une ambiance calme et apaisée, où rien n’est accentué (malgré la guerre qui gronde, dont Huston se fiche bien). Le scénario est pourtant parsemé de rebondissements et de "scènes fortes", mais à l’écran il y a très peu de variations rythmiques ou de changements de tons (en témoigne cette séquence étrange, sur la fin, où le soldat accomplit un acte héroïque sous le regard presque indifférent de la caméra). Un film très mitchumien, en somme. C’est que Mitchum a cette faculté incroyable, partagée par Cary Grant seulement, de parvenir à imposer à n’importe quel film sa musique propre, même lorsqu’il s’agit de l’œuvre d’un auteur à la pâte identifiable. Toujours est-il que l’auteur, ici, s’efface élégamment (ça soulage) et offre à ses deux acteurs le soin de jouer à leur façon cette chanson douce, intitulée
Dieu seul le sait
.
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