Tár

Avis

C'était un film qui ne m'intéressait pas du tout à la base car je pensais qu'il s'agissait d'un de ces films calibrés pour les oscars, avec des acteurs qui cabotinent et un point de vue sur la société complètement inoffensif, voir bien-pensant.
Il n'en est rien! La prise de risque est totale!

D'abord la prestation d'acteur de Cate Blachett est assez exceptionnelle. La toute première scène, où on la voit faire des tics, peut laisser supposer que la prestation sera maniérée, heureusement le reste du film nous montre quelque chose de tout à fait différent. Elle est d'une telle précision dans sa diction, ses gestes, qu'elle arrive à transmettre énormément avec peu de moyen. De plus qui savait qu'elle parlait allemand aussi bien? Je ne suis pas germanophone mais son allemand m'a semblé impeccable.

Ensuite la manière dont la thématique du film est abordé, à savoir la musique classique et la direction d'orchestre, est très appréciable car on a pas tenté d'ultra simplifier les choses pour rendre ça digeste pour le grand public tout en ne proposant pas quelque chose de trop pointu et obscur.

Au-delà de la musique classique, c'est un film qui aborde une belle variété de sujets et qui arrive à tous les traiter avec une belle part d'ambiguïté. Par exemple on nous parle de l'ivresse du pouvoir et de ses dérives, de comment une personne célèbre utilise son aura pour essayer de séduire de jeunes personnes et de comment d'autres personnes, jalouses que quelqu'un à la fois d'iconique mais également de pouvoir profite de son statut pour arriver à ses fins, vont essayer de la faire tomber coûte que coûte.

Et enfin la réalisation englobe le tout dans une belle austérité, qui lorgne presque parfois du coté du film d'horreur. Tous les lieux qu'on visite sont très urbains, modernes, composés de béton, à l'instar de cette immense maison aux murs bétonnés dans laquelle elle vit. Tout est gris, noir, blanc, pas de couleurs, pas de places pour les bons sentiments, c'est glaçant.
Assez tôt dans le film arrive un plan-séquence (où la cheffe d'orchestre fait une master class) qui peut sembler un peu anodin au départ (même si on le visionne avec grand plaisir) pour finalement se révéler pertinent dans ce qu'il dit des réseaux sociaux et de la binarité de ceux-ci, qui condamnent sans autre forme de procès, sans tenir compte de la complexité de la psyché humaine.

Une petite merveille.