Le Détroit de la faim

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Commentaires
25/11/2016 14:38:34
Un thriller génial dont il est difficile d'expliquer l'excellence sans le spoiler totalement. :-(
10/11/2018 01:26:01
Très bon, mais encore cette structure en deux parties grosso modo (comme dans Entre le ciel et l enfer) avec une seconde partie enquête qui prolonge vachement l histoire. C est caractéristique du film policier/enquête japonais ?Message édité
07/03/2021 23:05:21

Chef d'oeuvresque oui ! Tomu Uchida y insuffle ce même souffle romanesque digne des plus grands films japonais, à mes yeux l'aventure a été aussi riche et éprouvante que l'a été La condition de l'homme.


En plus de mettre sur pied un incroyable polar prenant et rigoureux jusque dans les détails délaissées dans la première partie, là où le film surprend c'est dans les nombreuses ramifications - sur une décennie-  dans lesquelles il va se diriger en fonction des trois personnages au cœur de l'affaire : le flic en charge du dossier, le malfrat et la prostitué.

Embranchements qui rejoignent le même carrefour, une magnifique fresque d'un japon d'après guerre dans la misère d'une vie sous occupation américaine, l'émergence de marché noir et de mafia locale, détresse dans laquelle le pays va devoir se reconstruire.

Ce qui m'a le plus impressionné c'est que ce grand portrait japonais se fait par le biais de la prostituée que je trouvais désagréable avec sa voix criarde, elle a même droit à certaines des séquences les plus mémorables : cet incroyable travelling dans la ruelle qui dure plusieurs minutes!


Rentarô Mikuni je l'adore, je l'ai découvert dans les films de Satsuo Yamamoto incarne là aussi un personnage qu'il affectionne particulièrement, sans trop spoiler on retrouve ce même miséreux en quête de rédemption qui tente de se reconstruire par le mensonge et l'apparence (on a vraiment l'exacte personnalité que dans Tale of Japanese Burglars). Il incarne ces personnes pour qui les turbulences d'un pays en plein mouvement a été profitable.


Ensuite Isao Tomito me confirme une ultime fois qu'il a été un des plus grands compositeurs de son temps, il faut entendre ces espèces de chœurs mortuaire qui accompagnent le voyou quand celui-ci est dans la tourmente la plus intense, je me revois Tatsuya Nakadai et son interminable marche pour la survie dans le Kobayashi.


Je ne m'attendais pas à ce que ce Tomu Uchida emprunte au film policier pour dresser un portrait si réaliste et caustique sans tomber dans le piège de la caricature (ce à quoi n'avait pas échappé le Kobayashi dans sa première partie du moins...).


Un immense film que je place sans conteste aux côtés de La condition de l'homme (partie 3) malgré 45 dernières minutes d'interrogatoires que j'ai trouvé un peu trop longues et avec cet ongle qui malheureusement pour lui me faisait sourire à chaque fois qu'on l'ôtait de son tissu.   


07/03/2021 23:13:23

J'adore Uchida mais j'ai toujours pas vu ce film parce que 3h + pas un jidaigeki. Mais là va falloir que je m'y mette je pense.

07/03/2021 23:29:01

Si ça peut te rassurer les 2h15 passent toutes seules (et j'étais très crevé en plus quand je l'ai vu), on peu dire que les registres changent en fonction des personnages à l'écran donc c'est vraiment emballant de constater que Uchida excelle dans toutes les parties. Il y a de l'enquête, un peu de romance, de la misère sociale, de la survie, tout ça enrobé dans une vaste fresque humaine.

La dernière partie moi j'ai toujours un peu de mal dans les films d'enquête donc je l'ai vu passer celle là.


Pour ma part c'est mon premier Uchida, je pense continuer avec les Musashi sous les conseils de Masamune.

Message édité
09/12/2023 18:07:26
Avis

Premier Tomu Uchida pour moi, on est face à un monument du cinéma japonais classique.

Le film prend la forme d’un film d’enquête mais défie les conventions avec une narration éclatée et relativement imprévisible : en gros on suit trois personnages qui vont chacun apporter leur propre lumière sur cette affaire et ça donne à cette simple histoire des proportions assez dantesques. Comme dans Entre le ciel et l’enfer de Kuro, on va utiliser le prétexte d’une enquête pour analyser les strates de la société japonaise d’après-guerre, en jetant bien évidemment un regard assez désabusé sur les inégalités sociales.

A ce titre là, le segment central du film peut paraître surprenant parce qu’on délaisse complètement l’enquête principal pour se concentrer sur un personnage féminin apparemment secondaire. Mais le fait de la suivre donne toute sa richesse au récit et lui permet de vraiment ancrer son propos sur les inégalités, les déterminismes et les désillusions face aux rêves d’ascension sociale. J’ai trouvé ça vraiment brillant dans la construction, surtout que ça rend le récit complètement imprévisible et donc d’autant plus captivant. J’adore comme le film construit les attentes pour mieux les déjouer, notamment en ce qui concerne le suspect principal qui est un personnage super complexe, le film sait vraiment quand s’attarder sur lui et quand le quitter, jouer des ellipses pour multiplier les questionnements avant ce dénouement d’une puissance rare.

Uchida est également un grand metteur en scène, il y a un quelque chose de wellesien dans son utilisation de la profondeur de champ et des mouvements de caméra, il va souvent privilégier des plans longs et des compositions complexes pour raconter plusieurs histoires au sein d’un même plan, pour lier les idées comme son récit lie les personnages et les intrigues au sein d’un plus vaste schéma. Il y a d’ailleurs plein de dimensions dans son cinéma au sein d’un même film : le filmage apocalyptique au début du film, les visions surréalistes parfois bien inquiétantes… Le film embrasse une dimension surréaliste tout en restant très social dans ses considérations, c’est vraiment super riche.

Belle claque et ça me donne envie de plonger dans la filmo d’Uchida.